En déballant ses cartons de livres dans leur nouvel appartement, Clémentine prend plaisir à passer en revue les titres des ouvrages. Ce roman a marqué son enfance, ce récit fantastique a enflammé l’imaginaire de son adolescence. Ce livre de cuisine, c’est sa grand-mère qui le lui a offert. Ici, ce sont les bandes dessinées données par son parrain. Le dictionnaire anglais, elle l’a acheté pendant ses études à Londres, pour parfaire son bilinguisme…
Pendant ce temps, Bastien déballe les bibelots et objets fragiles. Cette lampe lui vient de son grand-père, tourneur sur bois. Elle évoque pour lui l’odeur des copeaux dans l’atelier, la profondeur de la forêt du Morvan. Cet œuf peint aux couleurs vives, ce sont ses parents qui lui ont rapporté de Russie, lors d’un voyage pour retrouver la ville natale de la grand-mère. En démarrant leur vie de couple, Clémentine et Bastien ne partent pas de zéro. Ils viennent avec, dans leurs valises, leurs héritages familiaux, culturels et spirituels. Bien qu’ayant coupé le cordon, chacun se sait fils ou fille de…, héritier de la vie par la transmission des générations. «Quitter père et mère» permet de sortir de la fusion, du cocon sécurisant mais aussi infantilisant, pour devenir un adulte autonome avançant vers ses propres projets. Toutefois, on reste porteur d’un héritage transmis. Une hérédité génétique et une hérédité sociale, par exemple la langue, la culture, les croyances, les valeurs…
Cet héritage comporte des aspects positifs et constructifs. Des talents, des idéaux, des compétences. Mais aussi des aspects négatifs : des souffrances, des défauts, des visions enfermantes… Dans la phase de construction individuelle vers la maturité, chacun a la possibilité de prendre conscience de son héritage, de choisir de garder ce qui est bon pour lui et de rejeter le reste, en coupant des liens et posant des restaurations, si besoin.